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 Civilisation musulmane : passé et mondialisation III

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RACHTOK
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RACHTOK


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MessageSujet: Civilisation musulmane : passé et mondialisation III   Civilisation musulmane : passé et mondialisation III EmptyLun 22 Mai à 11:58

III- Rétrospective des influences entre le monde musulman et l’Occident


Schématiquement, depuis l’avènement de l’Islam jusqu’au processus de mondialisation, il eut trois périodes illustrant ces influences culturelles en fonction du rapport de force :


- La première est caractérisée par le rapport de force en faveur de la culture musulmane qui s’étend du VIIe au XIe siècle : l’Islam né au VIIe siècle a pris racine et s’est développé en Arabie avant de connaître une expansion rapide et spectaculaire. Dans un temps historique extrêmement bref, un peuple : les Arabes connus par leurs divisions coutumières, armé exclusivement de la foi, fit brusquement irruption dans le cours de l’histoire et conquit d’immenses contrées : La Perse, la Syrie, l’Egypte, l’Afrique du Nord, l’Espagne, les cotes de l’Italie, la Gaule pour s’étendre dans le monde connu de l’époque...L’Occident chrétien s’alarma dés cette époque, considéra l’Islam comme un ennemi et un danger permanent. Pour certains occidentaux, et jusqu’à une époque récente, l’Islam est une "pseudo- prophétie " qui, empêchant la christianisation de l’humanité a fermée les voies à l’évolution de celle-ci.


Mais derrière les premières réactions passionnelles de l’Occident, il y a une crainte maladive concernant l’imprévisibilité de l’Islam, à l’exemple de l’habile "voleur de Baghdad " des contes des mille et une nuit, qui avait enlevé comme l’éclair d’immenses contrées au domaine de la chrétienté. Blasco Ibanez fournit l’interprétation des faits de l’expansion rapide de la civilisation musulmane : " L’Espagne, esclave de rois théologiens et d’évêques belliqueux, recevait à bras ouverts ses envahisseurs(...). En deux années les Arabes s’emparèrent de ce que l’on mit sept siècles a leur reprendre. Ce n’était pas une invasion qui s’imposait par les armes, c’était une société nouvelle qui poussait de tous les cotés ses vigoureuses racines. Le principe de la liberté de conscience, pierre angulaire sur laquelle repose la vraie grandeur des nations, leur était cher. Dans les villes où ils étaient les maîtres, ils acceptaient l’église du chrétien et la synagogue du juif. ".


Le coté fascinant est relaté par M.Jacques Attali, conseiller de l’ancien Président de la France, M.François Mitterrand, décrivant un procédé d’automatisme fruit des sciences et techniques encouragées par l’Islam dés son origine : " En 807, Charlemagne reçoit de Haroun Rachid en cadeau une clepsydre de laiton avec des figures mobiles. Un texte du XVIIe siècle la décrit ainsi : "Une machine qui, actionnée par la force motrice de l’eau, marque les heures par un nombre approprié de petites boules en bronze qui retombent sur un timbre d’airain. A midi, douze cavaliers sortent par douze fenêtres qui se referment sur eux. ". Le "livre de la connaissance des dispositifs mécaniques ingénieux ", de Badi al Zamanibal Rezza al Tazan, établit que de telles clepsydres étaient connues dans tout le monde musulman dés le IXe siècle".


Le coté hostile fut déclenché par l’église. Il était représenté par certains "chercheurs" chrétiens qui mirent leurs aptitudes et leurs plumes au service d’une entreprise de déformation de la réalité musulmane. W. Montgomery Watt écrit : " On reconnaît désormais que les narrateurs chrétiens du Moyen Age ont transmis une image de l’Islam qui est sous beaucoup d’aspects malveillante. L’image négative de l’Islam dont l’Occident s’était imprégnée était une façon de chercher sa propre identité : le christianisme se posait en s’opposant à l’Islam jusqu’à l’outrance. L’Islam renvoyait l’Occident à une angoisse insupportable. Il voulait surtout ignorer ce qu’il devait à l’Islam ". W. Montgomery note le décalage existant entre musulmans et occidentaux quant à leur civilisation respective, les premiers étaient bien en avance par rapport aux seconds. Les occidentaux se réfugièrent alors dans leur foi pour continuer d’exister à travers une identité propre. ". Parlant des chrétiens, l’auteur affirme : " Ils se tournèrent vers les religions afin d’y puiser la force de s’affirmer face au groupe privilégié, ils s’orientèrent en particulier vers ce qu’on pourrait appeler deux nouvelles formes d’expression de la foi chrétienne, à savoir le culte de Saint- Jacques- de- Compostelle et les croisades. Le pèlerinage à Compostelle et l’enthousiasme pour les croisades à Jérusalem furent les deux pôles vers lesquels convergea la ferveur populaire. " ;


- la deuxième période s’étend du XIe au XVIe siècle où le rapport de force changeait imperceptiblement vers l’équilibre par le lent transfert du patrimoine civilisationnel du monde musulman à l’Occident concomitant avec les prémisses du lent déclin de son âge d’or : le coté fascinant de cette période fut représenté par Frédéric II de Hohenstaufen (1194-1250) qui discutait en arabe de philosophie et de logique, de médecine et de mathématiques avec des savants musulmans. Il fut admirateur de l’urbanisme et de l’architecture de la civilisation musulmane. Il implanta à Lucera, en Italie, une communauté musulmane et une mosquée avec tous les agréments liés à sa civilisation. Le pape Grégoire IX excommunia Frédéric II en 1239, l’accusant d’islamophilie.


Au cours de cette phase trépidante où les débats scientifiques rayonnèrent entre cultures, religions et peuples, de nombreuses œuvres pluridisciplinaires furent l’objet de traductions. Des textes musulmans se rapportant à la législation sur la guerre furent codifiés par Alphonse X. Saint Louis rapporta de sa première croisade des connaissances en matière de commerce maritime. Elles furent enrichies et codifiées vers 1340 à Barcelone. Les œuvres d’Ibn Sina, d’Ibn Rochd , d’Al Razi, d’Ibn Masawayh pour la médecine et d’autres manuels pour différentes sciences furent à plusieurs reprises copiés, imprimés, commentés et étudiés pendant des siècles. Du point de vue intellectuel, les grands savants musulmans dont les découvertes étaient des éléments novateurs pour la civilisation universelle étaient en voie d’être assimilées et intégrées dans la culture commune occidentale. Au début du XIV siècle, Dante place dans les Limbes, Ibn Sina, Ibn Rochd et Salaheddine seuls à coté des héros et des sages de l’Antiquité. L’Occident intégrait au fur et à mesure les fondements de la civilisation musulmane qui allaient lui servir d’élan propulseur pour la renaissance et l’accès au "modernisme ".


Olague note à ce propos : " La Renaissance n’a pas hérité directement des enseignements de la civilisation grecque après une période "obscure " appelée quelquefois "âge de fer ", le christianisme n’est pas le prolongement du génie hellène, ni saint Thomas le successeur d’Aristote. Galilée n’a pas, au XVIIe siècle, remis en marche l’évolution des sciences, laissée en suspens par la mort d’Archimède, au IIIe siècle avant Jésus-Christ ; le "splendide isolement " de l’Occident est une supercherie. ". Ce sont les œuvres musulmanes venues d’Espagne et de Sicile qui ont fécondé la civilisation. ". Ceci est confirmé par Paul Balta du quotidien "le monde " : " Or, l’héritage grec a été en grande partie transmis à l’Occident par les Arabes qui y ont ajouté leur apport propre. Et il fut considérable. Sans lui il n’y aurait probablement pas eu la Renaissance. Cela aussi, les Européens ont eu tendance à l’occulter". Et également par Roger Garaudy : " C’est dans l’Espagne d’Alphonse X, et dans la Sicile de Frédéric II, tous deux admirateurs passionnés de la culture musulmane qu’est né l’Occident "moderne " dont la civilisation arabo-islamique fut l’accoucheur et la mère nourricière. ".


En revanche, le coté hostile est reconduit par la motivation religieuse ayant joué le rôle fondamental dans la reconquête de l’Espagne par les chrétiens ainsi que dans les croisades. Alors que les chrétiens d’Espagne étaient désunis, le ferment religieux et la désignation du musulman comme l’ennemi commun, leur permirent de retrouver une identité et, conjoncturellement, de conclure des alliances entre eux : la Chrétienté affrontait l’Islam. Pour expliquer les croisades, W.Montgomery Watt affirme que le facteur principal fut que, durant des siècles, l’Islam était le grand ennemi qui contrôlait toute la Méditerranée. Beaucoup de chrétiens nourrissaient un complexe d’infériorité face à la supériorité culturelle des musulmans. " ;


- la troisième période s’étend de la renaissance occidentale à l’ère contemporaine. Elle est caractérisée par le rapport de force de l’Occident, malgré l’extension et le contrôle d’une grande partie de l’Europe et de la Méditerranée par l’empire ottoman pendant quelques temps, et finalement la décadence inéluctable du monde musulman. L’Occident fit une brillante renaissance au XVI-XVIIe siècles où les sciences et techniques furent les catalyseurs du monde moderne. La conscience religieuse ne polémiquait plus avec l’Islam. Mais dès qu’elle s’y intéressait, elle restait incapable, de dépasser ses racines dogmatiques. Dés les premiers signes de faiblesse du monde musulman, le sentiment de supériorité prit naissance en Occident. Et les rôles s’étaient désormais inversés. L’Islam devenait alors perçu comme une religion secondaire à écarter du courant spirituel central de l’humanité. Au XVIIIe siècle, l’Occident prit conscience de son identité et de sa force. Il se perçut comme le centre du monde. Il eut en même temps des courants d’universalisme, mais accorda la priorité aux valeurs gréco-romaines. Le monde musulman plongea dans une longue décadence. Pour Voltaire, Montesquieu et Volney, la cause de cette décadence est due aux institutions sociales et politiques. Volney alla jusqu’à lier la décadence avec l’apparition de l’Islam. Les romantiques du XIXe siècle s’intéressèrent à l’orient et à l’Islam, mais pour s’y opposer. Dans son mémoire sur l’Orient, Chateaubriand s’opposa à l’alliance franco- turque, et au moment même où l’Europe est préoccupée par l’avance russe, il considéra que la Turquie musulmane était l’ennemi principal. Il écrivit : "Des Ibrahims futurs pourront ramener l’avenir au temps de Charles Martel, ou au temps de Vienne...Vous ne voulez pas planter la Croix sur Sainte Sophie : continuez de discipliner des hordes de Turcs, d’Albanais, de nègres et d’Arabes, et avant vingt ans peut-être le Croissant brillera sur le Dôme de Saint Pierre(...) ".


Le XIXe et une partie du XXe siècle furent ceux de la colonisation d’une bonne partie du monde musulman. Cela favorisa un européocentrisme naturel qui prit une coloration arrogante. La seule voie possible offerte aux musulmans pour faire partie du monde moderne consistait dans l’adoption des valeurs occidentales, mais en même temps on soutenait que cela était impossible à cause des spécificités même de la culture musulmane. L’orientaliste Ernest Renan enfonça davantage le clou. Dans sa conférence du 29 mars 1883 à la sorbonne sur l’Islam et la science, il affirma que la culture musulmane périrait par l’influence de la science européenne. Il recommanda aux musulmans d’abandonner l’Islam et la culture dont ils étaient porteurs pour s’ouvrir au monde moderne. Inconsciemment ceux parmi les occidentaux qui adoptaient cette position savaient que les "musulmans " qui s’engageraient dans ce processus d’acculturation, de dépersonnalisation et de destruction seraient sans identité et donc colonisables. Cette stratégie d’acculturation fut méthodiquement et imperceptiblement mise en œuvre de génération en génération pendant et après les périodes coloniales et de protectorat. Le fruit de ce processus est représenté par la formation d’élites retournées contre elles-mêmes, ne représentant autre forme que le miroir du "moi " occidental. Et le monde musulman est actuellement tiraillé entre deux cultures : le "moi " occidental à la couleur locale côtoie son "voisin " et lavent régulièrement leur linge sale en famille sous le même toit ! Le roman de Driss Chraibi, le Passé simple, illustre parfaitement ce déchirement au sein de la même famille. Un père insulte son fils, car il estime que ce dernier a été perverti par l’éducation française : " Alors il y a eu toi. Toi, le poison. Et je ne sache pas que la Résidence se fut employée à faire chez nos fils aboutir son rapport culturel sous forme de poison ; ou, c’est intentionnel, il y a violation d’âme ; en tout cas, du jour où tu as fréquenté un lycée, tu n’as été que cela, poison. ".


Aujourd’hui, le monde musulman vit le même phénomène de fascination et de rejet, d’hostilité et d’attraction comme autrefois l’Occident devant le miroir du passé. La perte d’identité est considérée comme la plus grande menace à surmonter. Elle est bien illustrée par G.E. von Grunebaum écrivant à ce propos : " Le processus d’acculturation, avec sa recherche d’une nouvelle identité, l’éveil d’une sensibilité à des incitations nouvelles, où jusque-la négligées, l’enivrement de la découverte, l’embarras ressenti devant un héritage social et intellectuel qui persiste, et l’anxiété de rencontrer ses aspirations pour l’avenir précisément dans ce passé qu’on s’est montré si empressé de renier. Ce processus s’accompagne simultanément de triomphe et de douleur, d’un sentiment d’énergie et d’infériorité, qui se mélangent curieusement avec l’accablement qu’inspirent une situation héritée et l’arrogance du conquérant pressé de s’affirmer. L’individu et la société sont divisés contre eux-mêmes, ils subissent en même temps attraction et répulsion, placés face à la nonchalante agression de la mentalité occidentale. ".



Tajeddine Bennani

Source : http://oumma.com/
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http://rachtok78.skyblog.com
 
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